Jean-Michel est biologiste.

Jean-Michel est biologiste.
Il aime son métier.
Il aime les patients
.
Et il aime surtout… les tableaux Excel.


Dans ma prochaine chronique, Norma recevra la réponse à des écarts dont certains tenaient plus de la littérature absurde que de la qualité.
Un de ces écarts, mal compris, mal cadré, et jamais vraiment accompagné, a fini par semer une graine.
Et cette graine a poussé…


📈 Elle a donné naissance à un chef-d’œuvre de conformité : des tableaux Excel hypertrophiés, nourris année après année, “par principe” ou “parce qu’un jour, un auditeur l’a vu”.
Le résultat ?
De la couleur, des seuils, des macros… et une perte totale de sens.


📈 Chaque matin, Jean-Michel ouvre son fichier préféré :
“KPI_Stratégie_Qualité_V12_définitif_dernier_OK_VF2.xlsx”
Il y trouve ce qu’il faut pour piloter objectivement :

📈 324 indicateurs.
📊 47 couleurs.
🛑 12 seuils d’alerte et une macro qui clignote en rouge quand un CQI dépasse 0,0003 de CV.


C’est beau.
C’est propre.
C’est maîtrisé.
C’est… complètement illisible.

📞 Un jour, un technicien l’appelle :
– “Jean-Michel, le CQI est hors tolérance sur la troponine.”
– “Pas grave, l’indicateur global est vert.”
Ah, ouf.
Tant que c’est vert, tout va bien.
Même si personne ne comprend pourquoi.

🧪 Une semaine plus tard, un prescripteur demande un conseil sur un résultat borderline.
Jean-Michel hésite.
Doit-il… réfléchir ? Ou aller voir l’onglet “Décisions critiques” de son fichier Excel magique ?
Il choisit Excel.
Après 15 minutes de recherche, il trouve une case vide annotée :
“À définir.”
Parfait.
Rien à dire, donc.
La qualité est préservée !

📊 Un jour, une responsable qualité ose poser LA question :
— “Mais… à quoi ils servent, tous ces indicateurs ?”
Silence dans le service.
On la regarde comme si elle venait d’insulter l’ISO 15189.
(Elle sera discrètement exclue du prochain CODIR.)

📚 Et pourtant.
Tout le monde le sait.

80 % des indicateurs sont suivis “par principe”.
Ou parce qu’ils étaient là avant.
Ou parce qu’un auditeur les a vus un jour.
Ou parce que… c’est dans le tableau.


💡 Et si on remplaçait les indicateurs inutiles par… des questions utiles ?
À quoi ça nous sert ?
– Et surtout… est-ce qu’on comprend encore ce qu’on mesure ?

Jean-Michel continue d’alimenter son fichier, jour après jour.
Il ne sait plus vraiment pourquoi, mais au moins, l’écart est “clos”.


Ce fameux écart… Norma le connaît bien.
À l’époque, elle pensait aider.
Mais sans accompagnement ni cadrage, l’écart est devenu une usine à gaz Excel, déconnectée du terrain.

Elle note dans son carnet :

“Prochain audit : vérifier si l’indicateur sert encore à décider… ou juste à cocher une case.”

Elle referme son stylo en se disant qu’elle n’a pas fini d’en voir.

Pour accompagner ces réflexions, j’ai lancé une newsletter ici : https://isomere.substack.com/publish/home

« À quel moment la qualité a-t-elle cessé de rimer avec bon sens ? »